Présenté par certains de ses promoteurs comme le nouveau couteau suisse de l’épargne financière, le plan d’épargne retraite (PER) s’impose de plus en plus comme un outil patrimonial de long terme dont les ressorts gagnent à être identifiés pour une utilisation optimale.
Même s’il fait encore figure de poids plume face au Livret A ou à l’assurance-vie, le plan épargne retraite (PER) comptait fin janvier, dans sa version assurantielle, 3,9 millions de souscripteurs pour plus de 50 milliards d’euros d’encours sous gestion. Lancé en 2019, le PER creuse sans conteste sa place dans la panoplie d’épargne des Français. Cette percée tient en large part à l’absorption d’anciens contrats d’épargne retraite (PERP, Madelin, Préfon, Perco, etc.) désormais fermés à la commercialisation.
Mais le nouveau plan d’épargne retraite convainc également par ses propres atouts, ceux « d’un produit multifonctions adapté à différentes stratégies patrimoniales », résume Philippe Lauzeral, directeur général de Finzzle groupe (Stellium, Imodeus…). Quatre pistes sont notamment à explorer pour en optimiser l’usage au long cours.
1. Bien ajuster sa déduction fiscale
Dénouable, sauf dérogations (accidents de la vie, achat de sa résidence principale), au seul moment de la retraite sous forme d’un capital ou d’une rente (soumis à l’impôt dans les deux cas), cette épargne bénéficie, en contrepartie de son caractère « tunnel », d’un appréciable cadeau fiscal : chaque année les adhérents peuvent déduire leurs cotisations de leur revenu imposable, dans la limite de 10 % de leurs revenus professionnels (nets de frais) de l’année précédente eux-mêmes capés à un certain niveau calé sur le Pass (plafond annuel de la Sécurité sociale*).
En clair, pour les versements 2023, la déduction maximale est de 32.908 euros (avec un plancher de 4.114 euros pour les faibles revenus) et elle peut grimer jusqu’à 81.385 euros pour les travailleurs non salariés, qui ont un régime de déduction spécifique. Les cotisants ont également la possibilité de profiter des plafonds de déductibilité non consommés des trois années précédentes et de mutualiser ce bonus avec celui de leur conjoint.
Quelques réflexes s’imposent pour aiguiser ce levier qui échappe au plafonnement des niches fiscales et sera d’autant plus efficace en matière de capitalisation finale que l’économie d’impôt réalisée sera réinjectée dans le PER.
Tout d’abord, comme le rappelle Emmanuel Bouriez, directeur général de Predictis : « Il est utile de faire le point chaque fin d’année pour ajuster au plus près sa cotisation annuelle en fonction non seulement de l’évolution de ses revenus, mais également des autres dispositifs retraite, notamment collectifs (abondement sur un plan d’épargne salariale, alimentation d’un contrat retraite d’entreprise obligatoire) dont on peut profiter en parallèle et qui sont également déductibles. »
Par ailleurs, « compte tenu du caractère progressif du barème de l’impôt, il n’est pas nécessaire de cotiser au plafond pour optimiser son gain fiscal », observe Gaultier Lauriau, directeur des solutions patrimoniales chez Abeille Assurances. « Un contribuable marié, avec deux enfants à charge, qui paye un peu plus de 5.200 euros d’impôt pour un revenu net imposable de 72.000 euros profitera, avec un versement maximum de 7.200 euros sur son PER, d’une économie d’impôt de l’ordre de 1.859 euros. En versant 1.600 euros de moins, soit 5.600 euros, elle serait de 1.680 euros, soitproportionnellement plus rentable », illustre-t-il
Enfin, à la sortie, le capital cumulé sur le PER étant imposé comme un revenu (plus-values taxées au prélèvement forfaitaire unique, PFU, de 30 %), les professionnels s’accordent à penser que le taux marginal d’imposition du retraité doit fondre au moins d’une tranche (idéalement de deux) pour que l’épargnant soit globalement gagnant sur le plan fiscal.
2. Maximiser le potentiel financier
La gestion par horizon, déclinée en différents profils de risque (prudent, équilibré, dynamique) et sécurisée par l’assureur au fur et à mesure que le souscripteur approche de la retraite, s’impose par défaut. Ouverts sur des gammes plus ou moins étoffées de supports en euros et en unités de compte (UC), les PER peuvent toutefois être arbitrés librement ou faire l’objet d’une gestion mandatée, généraliste ou axée sur une thématique spécifique (investissement responsable, santé, immobilier, capital-investissement…).
« La profondeur de l’offre est un caractère différenciant essentiel pour ce plan de long terme qui, alimenté par des versements réguliers, permet de lisser ses points d’entrée sur les marchés financiers et donc d’optimiser la performance dans le temps », souligne Jérôme Devaud, directeur général délégué du groupe Inter Invest, l’un des rares acteurs du marché à proposer un PER individuel non pas assurantiel mais bancaire (sous forme de compte titres).
L’argument vaut en priorité pour les jeunes souscripteurs, mais concerne aussi les quinquagénaires, dont l’horizon de placement peut atteindre, voire dépasser, dix ans. Rien n’empêche, en effet, de conserver son PER après la retraite sachant que « la déduction des cotisations reste possible jusqu’à 73 ans pour un homme et 76 ans pour une femme, dans limite de 10 % du Pass* de l’année n-1 », précise Gaultier Lauriau. Par ailleurs si l’on dénoue progressivement son plan (retraits fractionnés), l’épargne restée en compte continuera de fructifier.
3. Jouer la carte familiale
On l’oublie parfois, mais un mineur peut dès sa naissance avoir son propre PER, avec un plafond de déductibilité dédié (10 % du Pass* de l’année n-1, soit 4.114 euros en 2023) cumulable avec celui de ses parents. « Si l’enfant a quatre ans au moment de la souscription, on rattrapera même les trois années précédentes », glisse Gaultier Lauriau, qui salue dans cette disposition « la possibilité de constituer pour l’enfant une épargne immobilisée jusqu’à sa majorité, date à partir de laquelle elle sera déblocable partiellement ou totalement pour financer l’achat de son premier logement, sans oublier toutefois que le capital retiré sera imposé comme un revenu et les intérêts générés soumis au PFU. ».
Autre option, « des grands-parents soucieux de donner un coup de pouce à leur petit-enfant pourront alimenter son PER dans une limite pécuniaire correspondant à un présent d’usage en spécifiant, le cas échéant, à l’assureur qui gère le plan qu’il s’agit d’un versement non déductible, ce qui est toujours possible. Cela permettra au jeune de disposer le jour venu d’un apport défiscalisé (seuls les intérêts seront taxés au PFU) pour financer l’acquisition de sa résidence principale ».
4. Renforcer sa prévoyance
Susceptible d’être débloqué sans pénalité fiscale (sauf prélèvements sociaux) dans certains cas précis – invalidité (du titulaire, de son conjoint, partenaire de pacs ou de l’un de ses enfants), décès du conjoint (ou partenaire de pacs), surendettement, cessation d’activité non salariée à la suite d’une liquidation judiciaire et expiration des droits à l’allocation chômage – le PER est « un véritable outil de protection », juge Philippe Lauzeral.
Dans le cadre du projet de réforme des retraites l’idée d’un retrait en cas de chômage à 60 ans a d’ailleurs fait son chemin sous forme d’amendement (non validé au moment où nous rédigeons ces lignes). Certaines offres contiennent des options complémentaires (garantie plancher, dépendance, table de mortalité, prise en charge des cotisations en cas d’incapacité temporaire de travail…) dont il convient néanmoins de bien soupeser le surcoût, de l’ordre de « 3 % ou 4 % des versements », indique Emmanuel Bouriez.
Enfin, si le titulaire du plan décède prématurément, ses bénéficiaires désignés profiteront (sauf s’il s’agit d’un PER compte titres) du régime fiscal de l’assurance-vie (abattement commun de 152.500 euros) sous réserve que le disparu ait moins de 70 ans (au-delà, l’abattement est réduit à 30.500 euros et la taxation classique des sommes capitalisées s’applique, intérêts compris). A noter : le conjoint survivant sera dans tous les cas exonéré de droits de succession.
Frais, n’oubliez pas l’addition !
Tous les promoteurs de PER sont dans l’obligation de publier sur leur site Internet un récapitulatif des différents coûts – contractuels et propres aux supports de gestion – de leurs offres. Aussi indispensables soient-elles, ces fiches normées rendent compte de frais moyens par grandes classes d’actifs (actions, obligations, diversifiées…) qui ne permettent pas d’identifier le coût réel des gestions pilotées ni celui de chaque unité de compte.
Il faut « se plonger dans les documents d’informations clés remis avant signature afin, notamment, de repérer le poids des éventuelles rétrocessions de commission, et quand c’est possible privilégier des ETF peu chargés ou des fonds ‘clean share’, sans rétrocessions », conseille Jérôme Devaud, directeur général délégué du groupe Inter Invest.
Date de parution : 15 mars 2023 - Par Laurence Delain
SOURCE : LESECHOS
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